« Scandale ! Blapshème ! Une honte » a crié toute la bonne société américaine lors de la parution de ce roman. Il faut dire qu’en 1956, on parlait peu de violence domestique, de sexualité et d’amours adolescents. Alors lorsque Grace Metalious s’empare de ces sujets et les dissèque de sa fine plume, c’est l’Amérique bien pensante qui s’offusque !
Car finalement, Peyton Place est une petite ville comme il y en a des milliers aux Etats-Unis. Et écrire que violence, inceste et luxure se déroulent derrière les coquettes façades victoriennes, c’est mettre en lumière ce qui se passe aux quatre coins du pays.
Parce qu’il y est question de la vérité, de cette violence exercée à l’encontre des femmes, mais également des premiers émois amoureux et de la découverte de la sexualité, ce livre fut longtemps interdit. Il acquit alors, par ce paradoxe bien connu, le statut de « must have« , et se passait sous le manteau, était lu en cachette et discuté avec des airs de conspirateurs.
Phénomène éditorial dès sa sortie, malgré la censure, il fut repris par le cinéma en 1957 pour être ensuite converti en série télévisée dès 1964. Et ce sont plus de 60 millions de téléspectateurs qui chaque semaine retrouvent Allison MacKenzie et Selena Cross, les deux héroïnes de cette histoire tourmentée.
Tout les oppose. Allison rentre après l ‘école dans une charmante maison victorienne, auprès de sa mère aimante, veuve depuis quelques années. Aimante ? Veuve ? Lorsque le vernis craque, les questions affluent…
Selena quant à elle, habite dans une de ces cabanes qui fleurissent aux limites de Peyton Place. Construites de carton et de goudron, elles sont l’expression de la misère la plus totale. Alcool, violence et peur sont les locataires de ce que les habitants appellent La zone.
Tout les oppose, mais elles deviennent amies. Et au travers de cette amitié bancale, Grace Metalious baigne dans l’acide les valeurs morales d’une Amérique hypocrite. Il ne s’agit donc pas d’une lecture calme et tranquille, mais plutôt d’une descente de rapides en kayak, alternant courants mortels et cascades vertigineuses.
Entre le rose pastel des premiers amours et le noir glacé des violences, des meurtres et de l’hypocrisie, Grace Metalious veille à ce que chaque détail soit porté à votre attention, vous emmenant de page en page à une vitesse folle, sans que la tension ne s’essouffle.
Du grand art pour ce classique devenu best-seller !
Peyton Place – Grace Metalious – Editions 10/18 – 692 pages