The Girls – Emma Cline

The Girls, c’est la descente aux enfers, sous hallucinogènes, de la jeune et tendre Evie Boyd. D’une maison de banlieue calme et insignifiante aux feux de joie en bande sur un terrain désaffecté, l’adolescente franchit le pas et les limites, avec toute l’obsession et l’inconscience de son âge.

Fascinée par une bande de jeunes filles dont la liberté et la confiance éveillent en elle une trouble obsession, Evie n’a plus qu’une seule idée en tête. Vivre comme Suzanne, qui semble se sentir tellement à l’aise dans cette bande. Et la rejoindre dans cette communauté qui vit en marge de la petite bourgade californienne, sans règles ni limites. Elle y rencontre Russell, le mâle alpha de cette « famille » marginale. Et comprend rapidement que pour ressembler à Suzanne, elle doit partager les fantasmes de celui-ci.

The Girls, c’est l’histoire de Charles Manson et de sa « famille ». L’histoire de ces trois jeunes adolescentes qui, à sa demande, assassineront Sharon Tate et ses amis. Pour rien. Ou plutôt pour une infinité de raisons : impressionner l’homme qu’elles adulent, exister, crier sa rage, évacuer une peur et un malaise oppressants, mais surtout et avant tout, la vengeance.

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Crédit : AP

Car c’est aussi de cela qu’il s’agit : se venger d’un monde dans lequel Evie s’est vue agressée plusieurs fois, dans lequel sa mère montre plus d’intérêt envers les hommes qu’elle poursuit que dans le parcours de sa fille. Un monde dans lequel Evie est offerte en cadeau à un homme qui a dépassé l’âge d’être son père. Un monde dans lequel les drogues et l’alcool permettent d’adoucir les plaies à vif, de brouiller les contours d’une réalité trop tranchante.
Et Emma Cline a un talent incroyable pour dépeindre cette réalité. Au bord du gouffre, elle traduit sans concession ni parti pris l’exacerbation de tous les sentiments, le franchissement de toutes les limites. Conditionnée par un seul objectif, celui d’être aimée, Evie Boyd prend vie sous ses mots, d’une façon entière et juste.

« Quand Suzanne arrêta la voiture et que Donna en descendit pour maculer de boue les deux premiers chiffres de la plaque d’immatriculation, je m’inquiétai à peine. Je rassemblai un courage inconnu, le sentiment de repousser les limites, et j’essayai de m’abandonner à l’incertitude. J’étais enfermée à l’intérieur de mon corps, d’une façon inconnue elle aussi. Peut-être était-ce le fait de savoir que je ferais tout ce que Suzanne me demanderait. C’était une pensée étrange : il n’existait que cette sensation banale d’être entraînée sur le fleuve éclatant de ce qui allait arriver. « 

J’ai été fascinée par la capacité de l’auteur à faire vivre cette histoire sans la peindre en noir et blanc, mais plutôt dans une palette de gris qui interroge, remet en place et suscite le débat. Ni victime, ni tout à fait coupable, qui était Evie Boyd?

Un grand talent d’écriture, une justesse sans faille, un roman hallucinant qui exige qu’on s’y arrête de suite !

The Girls – Emma Cline – Editions 10/18 – 355 pages

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